La SNCF et la retraite des cheminots : le dossier explosif qui rebondit à Bercy


L’accord sur les fins de carrière à la SNCF n’en finit plus de susciter la polémique : dernier épisode en date, la convocation du PDG Jean-Pierre Farandou par Bruno Le Maire à Bercy pour qu’il “rende des comptes”. “Un accord est signé qui engage effectivement les équilibres de la réforme des retraites et les équilibres financiers de la SNCF. Je n’ai pas été averti”, a déclaré Bruno Le Maire, interrogé ce jeudi 2 mai sur BFMTV/RMC.

Signé le 22 avril par les quatre syndicats représentatifs de la SNCF, un évènement très rare dans le groupe ferroviaire, l’accord va permettre aux cheminots de cesser leur activité avant la retraite, avec plus d’un an non travaillé et rémunéré à 75 % selon les catégories, suscitant des accusations de détournement de la réforme des retraites mise en place l’an dernier.

Le ministre a convoqué le patron de la SNCF “dans les tous prochains jours” pour qu’il “rende des comptes sur cet accord qui donne un sentiment de deux poids deux mesures et qui est très provocant pour beaucoup de nos compatriotes qui travaillent dur et qui ont accepté la réforme des retraites”.

Un langage à l’opposé de celui du ministre délégué aux Transports Patrice Vergriete. Interrogé sur le sujet mardi à l’Assemblée nationale, il assurait que “le contribuable ne versera pas un centime pour financer cet accord”. “Il n’y a plus de monopole, plus d’excuse au déficit depuis que l’Etat a repris une fois pour toute la dette de la SNCF – 35 milliards d’euros en 2018. Le client lui aussi est protégé par le jeu de la concurrence. C’est donc en interne, avec des gains de productivité, que la SNCF devra financer cet accord”, a-t-il rappelé.

Contournement de la réforme

Une position qui est celle du gouvernement, a indiqué son cabinet à l’AFP jeudi. Sur la convocation de Jean-Pierre Farandou, Bruno Le Maire “est dans son rôle de ministre de l’Economie” en recevant le patron d’un groupe public, s’est-il contenté de réagir.

L’accord entre syndicats et direction vise à améliorer un dispositif existant de retraite anticipée et qui datait de 2008. Il permettra par exemple aux conducteurs, d’entamer une “cessation anticipée d’activité” 30 mois avant leur retraite avec 15 mois travaillés rémunérés à 100 % et 15 mois non travaillés rémunérés à 75 %. Pour les contrôleurs, qui avaient provoqué des annulations massives de train en plein week-end de vacances scolaires en février avec une grève, l’accord est encore plus avantageux puisqu’il court sur 36 mois dont 18 non travaillés et payés à 75 %.

La droite a aussitôt attaqué ce dispositif, qualifié de “contournement de la réforme des retraites” par le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau. Même l’ancien ministre des Transports Clément Beaune s’est dit “un peu choqué”, craignant une augmentation des tarifs pour les usagers.

Groupe rentable

Des réactions qui ont suscité l’ire des syndicats cheminots. “Ca démontre bien que quand on est capables de négocier un accord où l’enjeu de la répartition des richesses est posé, ça pose problème, notamment aux responsables politiques de droite”, a dénoncé auprès de l’AFP le secrétaire général de la CGT-Cheminots, premier syndicat à la SNCF, Thierry Nier. Ce type de dispositif “existe dans d’autres métiers, par exemple chez les routiers, le congé de fin d’activité (CFA) permet de partir cinq ans plus tôt. Il y a plein de grosses boîtes qui ont ça”, a répondu Fabien Villedieu, de Sud-Rail. “La SNCF est l’entreprise ferroviaire la plus rentable d’Europe donc elle a les moyens financiers d’absorber ces mesures”, selon lui. Le groupe ferroviaire public a dégagé 1,3 milliard d’euros de bénéfice en 2023, après 2,4 milliards en 2022. “A quel moment c’est scandaleux qu’une entreprise décide de gérer les richesses qu’elle a créées”, demande le secrétaire général de la CFDT-Cheminots, Thomas Cavel.

Outre sa convocation à Bercy, Jean-Pierre Farandou est appelé à s’expliquer devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat mardi prochain pour évoquer les “conséquences préoccupantes de l’accord”. Son avenir s’écrit en pointillé puisqu’il est toujours en attente d’un renouvellement de son mandat qui doit intervenir avant l’assemblée générale de la SNCF, le 13 mai.




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