Centenaires en France : l’envolée spectaculaire de la longévité au fil des ans


C’est un article de l’Institut national d’études démographiques (Ined) qui vient confirmer la hausse importante de la durée de vie en France. Dans cette étude publiée dans la revue Population et Sociétés du mois d’avril, les auteurs l’assurent : l’augmentation du nombre de centenaires depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale est “spectaculaire”. D’une centaine en 1900 ou près de 200 à 1950, leur nombre est ainsi passé à plus de 1 000 en 1970, puis à plus de 8 000 en 2000.

Une augmentation qui est loin de ralentir depuis, avec une multiplication par quatre du nombre de centenaires en France sur ces vingt-cinq dernières années, qui dépassaient les 31 000 au 1er janvier 2024. “Sous l’hypothèse d’une poursuite des tendances actuelles de la mortalité, l’Insee projette plus de 200 000 centenaires en 2070”, pointe l’étude, rappelant qu’alors que “seules 0,02 % des personnes nées en 1850 sont devenues centenaires, cette proportion s’élève à 2 % pour la génération 1920 soit une multiplication par 100 de la probabilité d’atteindre 100 ans”, y apprend-on également.

La surreprésentation féminine

Plus particulièrement, les chercheurs se sont intéressés à la classe d’âge des plus de 105 ans, également en pleine augmentation ces dernières années. Leur nombre était ainsi estimé à près de 2 000 au 1er janvier 2023, rappelle l’Ined, soit le nombre de centenaires en France en 1981.

Pour pouvoir étudier plus précisément cette évolution, l’étude de l’Ined s’est notamment basée sur l’évolution de la mortalité à plus de 105 ans en France. Des chiffres rapportés par l’International Database on Longevity, un groupe de chercheurs internationaux qui s’attelle à recueillir ces données dans plusieurs pays occidentaux, et qui se base en France sur des données de l’Insee.

La conclusion est sans appel : alors que le nombre de décès par an de personnes de plus de 105 ans ne dépassait pas la centaine avant les années 1990, ce nombre n’a fait qu’augmenter progressivement au fil des années. Jusqu’à même s’approcher des 1 000 décès par an au tournant des années 2020. “Bien sûr ce nombre est encore dérisoire (moins de 0,15 %) comparé aux plus de 600 000 décès observés chaque année en France mais son explosion est spectaculaire”, concluent les chercheurs de l’Ined.

L’autre constat concerne l’écrasante surreprésentation féminine dans ces chiffres de mortalité. Ainsi, en 2020, sur les 924 personnes de plus de 105 ans décédées, on comptait 843 femmes pour 81 hommes, soit un rapport de plus d’1 pour 10. “Ce ratio impressionnant tient entièrement à la surmortalité masculine, qui prévaut tout au long de la vie, notamment aux âges actifs, et qui réduit d’autant les effectifs des générations masculines par rapport à leurs homologues féminines”, explique l’étude.

Enfin, concernant la baisse de ces dernières années, depuis le pic en 2020, la réponse n’est pas à trouver dans une éventuelle rechute, mais bien à “l’arrivée à cet âge des classes creuses nées durant la Première Guerre mondiale”, avec un effondrement des naissances entre 1915 et 1919 qui se répercute aujourd’hui, explique l’Ined

La révolution de la longévité

Les chercheurs de l’Ined le concèdent néanmoins : si cette étude permet de valider une augmentation des “âges extrêmes atteints par quelques individus”, elle ne permet pas encore d’affiner “les estimations des risques de décès aux très grands âges”. En d’autres termes, l’échantillon reste encore pour l’instant trop insuffisant pour pouvoir tirer de réelles conclusions sur les taux de mortalité des personnes âgées de plus de 100 ans, et en particulier pour ceux de plus de 105 ans.

“À ces âges avancés, les nombres d’observations restent encore insuffisants pour trancher le débat entre les partisans d’une poursuite de la hausse exponentielle de la mortalité avec l’âge, telle qu’observée aux âges plus jeunes, et les tenants de l’hypothèse d’un ralentissement de la hausse ou même d’une stagnation aboutissant à un plateau de mortalité”, conclut ainsi l’équipe de chercheurs.

L’Express avait de son côté consacré en décembre dernier un large dossier à la révolution scientifique en cours sur la longévité. Essais cliniques pour freiner le vieillissement, investissements massifs de riches biotech qui veulent “tuer la mort”, rajeunissement du cerveau : vivre jusqu’à 120 ans ne sera peut-être bientôt plus un mirage. Les chiffres de mortalité des centenaires dans les années 2020 ne seront peut-être bientôt que de lointains souvenirs.




Source