Drame lors d’une distribution d’aide à Gaza : ces deux versions qui s’opposent


C’est un drame qui est intervenu le jour où le mouvement islamiste du Hamas a annoncé que plus de 30 000 personnes étaient mortes en près de cinq mois de guerre dans le territoire palestinien. Une foule s’est ruée sur un convoi d’aide alimentaire dans la ville de Gaza, faisant, selon le ministère de la Santé du Hamas, 112 morts par balle et 760 blessées, ce jeudi 29 mars. Un bilan qu’aucune source indépendante n’est pourtant en mesure de vérifier. Ce drame a soulevé au sein de la communauté internationale indignation et appels à établir la vérité.

Deux versions différentes ont rapidement émergé. Le Hamas affirme que l’armée israélienne a ouvert le feu sur la foule. Israël reconnaît de son côté des “tirs limités” des soldats qui se sentaient “menacés”, assurant que la majorité des personnes tuées l’ont été dans une bousculade.

“Une réponse limitée, des tirs limités”

Un témoin a déclaré à l’AFP que les violences ont éclaté alors que des milliers de personnes désespérées en quête de nourriture s’agglutinaient près du “rond-point de Naplouse”, dans l’ouest de Gaza-Ville. “Des camions remplis d’aide se sont approchés trop près de certains chars de l’armée qui se trouvaient dans la zone et la foule, des milliers de personnes, a pris d’assaut les camions”, a déclaré le témoin, refusant d’être nommé pour des raisons de sécurité. “Les soldats ont tiré sur la foule car les gens s’approchaient trop près des chars”.

Hossam Abu Safiya, directeur de l’hôpital Kamal Adwan de Gaza-Ville, a déclaré que toutes les victimes avaient été touchées par “des balles et des éclats d’obus provenant des forces d’occupation”.

Des images aériennes publiées par l’armée israélienne montrent ce qu’elle dit être des dizaines de Gazaouis encerclant les camions d’aide. Un responsable militaire israélien a évoqué une première bousculade, impliquant “des milliers de personnes” au cours de laquelle “des dizaines de Gazaouis ont été blessés et tués, certains d’entre eux écrasés par les camions” qui roulaient. Une partie du convoi a continué sa route, poursuivi par “des dizaines de civils” qui se sont approchés des chars et des forces israéliennes, selon le responsable.

Des convois pillés par des civils désespérés

“Les soldats ont tiré des coups de semonce en l’air, puis ont tiré sur ceux qui représentaient une menace”, a-t-il ajouté, soulignant qu’ils avaient eu “une réponse limitée, des tirs limités”. En soirée, le porte-parole de l’armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari, a affirmé que les soldats n’avaient mené “ni tirs de tanks, ni frappes aériennes en direction du convoi”. Daniel Hagari a par ailleurs indiqué que le convoi de 38 camions entré à Gaza depuis le terminal de Rafah, à la frontière égyptienne, était affrété par des “entreprises privées”, sans autre précision.

Le 20 février, le Programme alimentaire mondial a annoncé qu’en dépit de la faim généralisée, il suspendait à nouveau les livraisons d’aide au nord de Gaza après l’attaque et le pillage de convois par des civils désespérés.

Le 18 février, un convoi a dû repousser “de multiples tentatives de personnes tentant de monter à bord de nos camions, puis de faire face à des tirs une fois entrés dans la ville de Gaza”, a indiqué l’agence onusienne. Le lendemain, “plusieurs camions ont été pillés […] et un chauffeur de camion a été battu. Le reste de la farine a été spontanément distribué à partir des camions dans la ville de Gaza, au milieu d’une forte tension et d’une colère explosive”, a-t-il ajouté.

Des condamnations internationales

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit “choqué” par ces événements qu’il a “condamnés”. “Nous ne savons pas exactement ce qui s’est passé. Mais que ces gens aient été tués par des tirs israéliens, qu’ils aient été écrasés par la foule, ou renversés par des camions, ce sont des actes de violence, d’une certaine manière, liés à ce conflit”, a déclaré son porte-parole, Stéphane Dujarric.

A Washington, le porte-parole du Département d’Etat Matthew Miller a indiqué que son pays, fidèle allié d’Israël, exige “des réponses” après cette tragédie. “Nous sommes en contact avec le gouvernement israélien depuis tôt ce matin et comprenons qu’une enquête est en cours. Nous suivrons cette enquête de près et nous ferons pression pour obtenir des réponses”, a-t-il ajouté. La Maison-Blanche a par ailleurs fait savoir que le président Joe Biden avait évoqué au téléphone avec l’émir du Qatar et le président égyptien cet “épisode tragique et alarmant”.

A Paris, le président Emmanuel Macron a, lui, exprimé sa “plus ferme réprobation envers ces tirs” contre des civils “pris pour cible par des soldats israéliens” et demandé “la vérité, la justice et le respect du droit international”.




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